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POINT DE VUE-Nous avons raison de ne pas nous résigner

22/12/2011 | FR / NL

Au vu du discours médiatique d’une remarquable unanimité qui a accompagné la grève générale des services publics du 22 décembre 2011, il nous apparaît indispensable d’expliquer notre position, à nous syndicalistes responsables. Tous les médias ont lourdement insisté sur le fait que faire grève ne servirait à rien car les mesures prises par le gouvernement seraient indispensables. Que notre pays n’aurait pas le choix. Faire grève serait dans ce cadre un simple défouloir émotionnel et en aucun cas un geste politique. En quelque sorte, et la manière dont le gouvernement a fait passer en force et en extrême urgence ses mesures en sont également un signe, la démocratie au 21e siècle se résumerait à tolérer une expression citoyenne mais en aucun cas à y accorder une importance ou à la prendre en compte. Seuls les techniciens, les experts, seraient aptes à savoir ce qu’il faut faire pour gérer l’État correctement. Nous assistons ainsi à une dérive inquiétante de la démocratie en une technocratie où le choix politique se réduit comme peau de chagrin dans un espace déterminé par la Commission européenne, la BCE et les agences de notation. Qualifier aujourd’hui le gouvernement de « papillon » ne serait-il pas un écran de fumée devant une réalité plus antidémocratique qui nécessiterait qu’on le qualifie de « gouvernement Moody’s et Standard & Poor’s » ?

 

Nous désirons clarifier les choses sur deux points. Premièrement, seul celui qui ne lutte pas a déjà perdu. Les médias ont mis en avant dans les personnalités positives qui ont marqué l’année 2011 la figure du manifestant[1]. Et ces mêmes médias, lorsqu’il s’agit de gens qui se mobilisent en Belgique, les dénigrent. Ce qui est efficace à l’étranger serait ainsi inutile dans notre pays ? Cette position quelque peu schizophrénique ne peut manquer d’interpeller. Il semble donc important de rappeler que la sécurité sociale, les services publics, le droit de vote, la fin du travail des enfants, la réduction du temps de travail… bref, toutes les conquêtes sociales dont nous bénéficions aujourd’hui ont été arrachées par des luttes sociales contre un discours fataliste qui soulignait que cela n’était pas possible. À chaque fois, le patronat a entonné son refrain connu : ces mesures vont menacer la compétitivité de nos entreprises face à la concurrence étrangère et nous serons obligés de fermer ou de délocaliser. À chaque fois, après des mobilisations sociales importantes, qui coûtèrent trop souvent la vie à des travailleurs, le monde politique a dû lâcher du lest et accorder les améliorations sociales réclamées. Et à chaque fois la catastrophe économique annoncée ne s’est pas produite et les profits des entreprises sont restés suffisamment confortables pour maintenir l’activité.

 

Cela nous amène à notre deuxième point. On nous rétorquera : c’est de l’histoire ; la situation était différente ; aujourd’hui, l’économie est mondialisée, l’actionnariat des entreprises n’est plus le même… Nous connaissons ce discours matraqué par tous ces économistes qui savent scientifiquement expliquer pourquoi ils se sont trompés dans leurs analyses antérieures et pourquoi ils n’ont pas vu venir les différents crashs économiques de ces dernières années. Mais la réalité, c’est que la richesse produite en Belgique ne cesse d’augmenter. C’est que le bénéfice des entreprises et le return aux actionnaires sont toujours confortables. C’est que depuis 1973 on nous parle d’une crise qui n’est en rien une crise économique mais bien une modification radicale de la répartition des richesses.

 

Concrètement, les mesures dites « injustes mais indispensables » pour reprendre l’expression du « socialiste » Philippe Moureaux sont des choix politiques destinés à faire payer aux plus faibles les revenus de plus en plus importants des plus riches. Même en acceptant la nécessité de trouver un minimum de 11 milliards d’€, la FGTB a démontré avec des chiffres non contestés, sous le slogan « on a retrouvé l’argent », qu’il était possible de trouver plus de 8 milliards avec trois mesures simples : 1° en globalisant tous les revenus et donc en imposant aussi les revenus mobiliers et les revenus immobiliers ; 2° en rétablissant des tranches d'imposition sur les très hauts revenus (à 55% sur ce qui dépasse 8.000 € bruts et à 65% sur ce qui dépasse 14.000 € bruts par mois) ; 3° en supprimant les intérêts notionnels.

 

Utopique ? Non crédible ? Délire gauchiste ? Bien au contraire, discours construit et réelle alternative aux mesures qu’on nous présente comme incontournables. Ne prenons qu’un seul dernier exemple. Celui des intérêts notionnels. Nous dénonçons depuis longtemps ce système de fraude fiscale légalisée mis en place par Didier Reynders et qu’aucun parti actuellement au parlement ne veut supprimer purement et simplement. Nous avions dit que les intérêts notionnels étaient des fossoyeurs de l’emploi[2]. Et ce mercredi 4 janvier, quelle ne fut pas notre – bonne - surprise en découvrant en une de L’Echo un article intitulé « Intérêts notionnels : pas d’effets retour ». Et l’article, reprenant une étude du SPF finances, de confirmer ce que nous disons depuis le début : les capitaux attirés en Belgique par ce système ne servent qu’à blanchir fiscalement l’argent des grosses multinationales et à accroître les bénéfices des détenteurs du capital. Les intérêts notionnels ne génèrent ni valeur ajoutée, ni emploi, ni investissement.

 

C’est ainsi la presse économique - et pas le centre d’étude du PTB - qui confirme ce que nous, syndicalistes soi-disant irresponsables, disons depuis longtemps : oui, d’autres choix politiques sont possibles. Oui, la richesse produite en Belgique permet, si elle est mieux répartie, si elle revient plus à ceux qui la produisent réellement, de ne pas prendre des mesures qui généreront de la misère, qui augmenteront encore le surendettement et la pauvreté que tous les élus politiques condamnent tout en votant des mesures contraires à leurs déclarations.

 

L’austérité est donc loin d’être une fatalité. En démocratie, toute loi peut être revue et modifiée. Rien n’est définitif ou immuable.

 

Balzac disait que « la résignation est un suicide quotidien ». En tant que syndicalistes, nous refusons de participer à un suicide de masse. C’est pourquoi nous continuerons en 2012 à mobiliser les travailleurs pour prôner nos alternatives et que nous ferons une grève générale dès ce mois de janvier.

 

            Égidio Di Panfilo, secrétaire général du SETCa-Liège


 

[1] Ainsi le Time en fit sa figure de l’année

[2] Voir notre carte blanche parue dans La Libre du 15 octobre 2010