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POINT DE VUE-Harmonisation des statuts : Un peu d’audace que diable !

18/04/2019 | FR / NL

Si on y ajoute les contractuels du service public, ce sont 3 millions de personnes qui risquent de voir leurs droits sociaux rabotés par un gouvernement qui n’en finit pas d’appliquer des mesures d’austérité. Après des attaques contre leur pouvoir d’achat ou contre ceux d’entre eux qui sont privés d’emploi, c’est donc directement aux contrats de l’ensemble des travailleurs que le gouvernement compte s’attaquer. C’est contre cette logique que le 6 juin les syndicats seront une nouvelle fois dans les rues de Bruxelles en liant logiquement ce dossier à celui de l’accroissement de la flexibilité, du blocage salarial et d’une fiscalité plus juste.

Cela fait des années que la question de la différence entre les statuts d’ouvrier et d’employé est sur la table, constituant un véritable BHV social. Ce dossier est une des raisons pour lesquelles nous avons rejeté le projet d’accord interprofessionnel 2011-2012 qui prévoyait un recul important du statut des employés et, qui plus est, déplaçait les coûts d’un licenciement des entreprises vers la sécurité sociale. En clair, et vu le mode actuel de financement de cette dernière, ce sont les travailleurs qui allaient financer leur propre licenciement ! Si notre refus a très fortement limité la casse, il n’a cependant pas empêché le gouvernement de passer ensuite en force pour déjà modifier les durées de préavis et permettre le chômage économique pour les employés.

Aujourd’hui, en Belgique, ce dossier semble devenir le plus important de tous. Subitement, de grands démocrates se trouvent une vocation à combattre une discrimination jugée intolérable. C’est là une indignation à géométrie variable ! Quid en effet de la discrimination que continuent à subir les femmes pour lesquelles l’égalité salariale n’est toujours pas une réalité ?? Quid de la discrimination à l’embauche que subissent les jeunes issus de l’immigration ? Quid de la discrimination qui veut qu’un grand patron puisse gagner des dizaines de fois plus qu’un de ses employés ? Et que le même patron puisse bénéficier d’un parachute doré dont le montant n’appartient plus à la même réalité que le préavis d’un de ses ouvriers ? Plus largement, quid de la discrimination qui permet depuis une trentaine d’années un décrochage de plus en plus grand entre des bénéfices qui explosent et les conditions socio-économiques du monde du travail qui stagnent, voire se dégradent ? Quid enfin de la discrimination qui permet que, dans un des pays les plus riches au monde comme le demeure la Belgique, plus de 15% de la population vit à la limite ou sous le seuil de pauvreté, et qu’un quart de ces personnes pauvres soient des travailleurs ? Voici des discriminations subies quotidiennement par les salariés et contre lesquelles on n’entend guère l’humanisme du patronat s’indigner. Il est vrai que l’on ne peut se poser de telles questions quand on a un portefeuille à la place du cœur…

On le voit, la discrimination entre ouvriers et employés est loin d’être la seule discrimination existante dans le monde du travail.

Comme les médias l’ont bien expliqué, l’harmonisation des statuts d’employé et d’ouvrier implique de nombreux aspects. La plupart d’entre eux concernent les droits individuels des personnes. Certains recouvrent également des aspects collectifs, touchant aux juridictions du travail ou aux élections sociales. Le livre Cols Blancs, cœur rougeque nous avons publié en décembre souligne aussi les conséquences des réformes à venir sur la manière dont sont structurées les organisations syndicales. Ce dossier entraînera donc des bouleversements très importants dans le paysage socio-politique de notre pays.

Parmi toutes les questions que recouvrent ce dossier, pour lesquels les solutions du SETCa sont connues, il est cependant bien clair que c’est la durée de préavis qui est au cœur de l’absence de solution actuellement.

Soyons clairs : tout abaissement de la durée du préavis des employés serait une régression sociale inacceptable qui ouvrirait la voie à une flexibilité encore accrue du « marché de l’emploi ». La seule ambition digne d’un pays moderne et développé est d’améliorer le sort de ses habitants. C’est pourquoi il faut amener progressivement la durée de préavis des ouvriers au niveau de celui des employés, et non l’inverse. C’est cela le progrès social. C’est cela la solidarité.

A chaque fois que les travailleurs se sont mobilisés pour obtenir une amélioration de leur condition, le patronat a expliqué que le coût pour les entreprises de ce progrès social menaçait leur compétitivité et entraînerait des pertes d’emplois et des délocalisations. A un siècle de distance, il est frappant de constater que les arguments patronaux pour refuser aux ouvriers un progrès social sont les mêmes que ceux qui s’opposaient à la fin du travail des enfants.

En ce début de 21e siècle, il est temps de sortir du conservatisme pour travailler au progrès. Il est temps de se tourner vers un projet de société qui regarde vers l’avenir et non vers le passé. Un projet de société qui ne vise pas à faire régresser les conditions de travail et de rémunération au niveau du 19e siècle, mais qui au contraire améliore la situation du plus grand nombre en répartissant équitablement les richesses produites. Une société du 21e siècle où l’émancipation intellectuelle permettrait une émancipation professionnelle et l’application des principes démocratiques au sein des entreprises, dernier lieu de féodalité où le pouvoir se transmet encore de génération en génération. Il est temps de sortir de ce Moyen Âge social et d’aller vers une société moderne où un préavis conséquent est vu comme un gage de stabilité, non seulement pour le travailleur, mais aussi pour le patron. Ainsi, tous pourront se projeter dans l’avenir, sans être toujours tracassés par un licenciement dont le coût, soulignons-le, ne se réalise que si l’employeur souhaite que le préavis ne soit pas presté.

Il reste un mois aux partis présents au sein du gouvernement pour montrer s’ils sont progressistes ou conservateurs. Pour ou contre le progrès social de 3 millions de travailleurs. 3 millions de travailleurs qui seront également des électeurs dans un an, en mai 2014.

 

Égidio Di Panfilo, secrétaire général du SETCa Liège-Huy-Waremme